Histoire

Né de l’urgence d’insérer professionnellement les femmes rapatriées d’Algérie, l’atelier de tissage de Lodève remonte dans sa genèse à 1962. Si un premier atelier de tissage fut créé en 1963 au château de Lascours dans le Gard. Simultanément, la ville de Lodève se porta candidate pour accueillir une soixantaine de familles afin de limiter la décroissance démographique du Lodévois. En 1964, les familles sont accueillies dans les immeubles érigés par la société Sonacotra et en parallèle, l’atelier de tissage de Lascours est transféré à Lodève. La majorité des femmes employées connaissaient les techniques de tissage traditionnels algériens et plus généralement des pays du Maghreb. En attendant un véritable organisme, l’atelier a été provisoirement installé dans des baraquements qui appartenaient à l’armée, non loin des logements. Une fois l’atelier créé, celui-ci attira vite l’attention des pouvoirs publics. C’est en 1965 que se font les premiers échanges entre le ministère de l’Intérieur et le ministère des Affaires culturelles. Il fut alors décidé de convertir ce lieu de production en une annexe de la fameuse Savonnerie parisienne. C’est le 1er mai 1966 que l’atelier de Lodève passa sous la tutelle du Ministère des Affaires Culturelles ainsi que sous l’égide de l’Administration Générale du Mobilier National des Gobelins, de Beauvais et de la Savonnerie. Dans les années 1980, sous l’impulsion de Claude Mollard, le Ministère de la Culture et de la

Communication engagea une réflexion pour doter Lodève d’un nouvel atelier plus adapté. Les baraquements provisoires avaient en fait duré plus de vingt ans et c’est grâce au ministre Jack Lang qu’un nouveau projet est lancé. Le ministre confia le chantier du nouveau bâtiment à l’architecte Philippe C. Dubois. Le programme fut réalisé sur un terrain cédé par la municipalité, à l’entrée sud de la ville, et complété par l’implantation d’une crèche. En 1987, François Léotard posa la première pierre du chantier qui dura trois ans. L’édifice fut achevé en 1990.

Description

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Ouvrage de la Manufacture de la Savonnerie de Lodève, par Toutaitanous , via Wikimedia Commons

En ce qui concerne la fabrication, Lodève diffère, pour sa mise en œuvre, des autres manufactures nationales. En effet, les modèles occidentaux, développés dans les ateliers parisiens, correspondent à un système de représentation inconnu des Lodévoises, qui ont un autre vocabulaire symbolique lié à leurs propres coutumes. Ainsi, elles ont pour principale activité de tissage au point noué de tapis destinés à l’État. En ce qui concerne les productions de la manufacture, il en sort aussi bien des pièces classiques que des pièces contemporaines.La construction s’inscrit à flanc de colline, au cœur d’un jardin méditerranéen. Le bâtiment est de  2200 m2, il compte des locaux administratifs, une salle d’exposition pour présenter des œuvres tissées dans l’atelier, des réserves pour les laines teintes et les supports graphiques nécessaires à la confection des tapis. L’atelier est situé à l’étage, de manière à capter un maximum de lumière. Onze métiers de différente taille occupent l’espace. Le plus vaste local permet la réalisation d’un tapis de 5,30 m de large. En lien avec l’espace central, on trouve la salle de préparation des modèles et la salle dite « aux rouets » qui est quotidiennement utilisée par les liciers lors de la confection des broches. Aujourd’hui, l’atelier compte dix-huit liciers et fait figure d’exemple, en termes de mixité sociale et culturelle. Au fil des années et ce, depuis 1966, l’atelier national de Lodève fait totalement partie de la manufacture de la Savonnerie. Ensemble, les ateliers parisiens et lodévois perpétuent un savoir-faire ancestral mais toujours tourné vers la modernité. Ainsi, toutes les créations de Lodève, qu’elles soient des copies du style Louis XIV ou bien des tapis réalisés d’après les modèles originaux d’artistes contemporains, viennent enrichir les collections du Mobilier national.

Parmi ces chefs d’œuvres, on peut admirer le prestigieux tapis de style Louis XIV qui orna le vestibule des Huissiers du Palais de l’Élysée de 2007 à 2010. Tout l’atelier participa à sa confection qui nécessita pas moins de 147 jours de préparation, 1358 jours pour les opérations préliminaires (calques, tracé, rangement…) et 4922 jours de tissage. Les créations contemporaines sont signées par des artistes reconnus. C’est le cas de l’œuvre Au temps Jadis de Jean-René Sautour-Gaillard, à la fois figurative et abstraite, qui offre des jeux de contrastes et dévoile un véritable travail sur la gestuelle.

L’atelier national de la Savonnerie de Lodève est la seule fabrique en province. Une hégémonie méritée car ses productions montrent que les œuvres tissées ne sont pas des copies mais bien des créations à part entière.